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Une épine dans la hanche de Sulzer Medica

Fabrication des prothèses au siège principal de Sulzer Medica à Winterthour. Keystone

Seuls 132 Américains ayant reçu une prothèse défectueuse refusent l'accord global d'indemnisation. Mais ils pourraient coûter cher à Sulzer Medica.

Cet accord a été approuvé définitivement par la juge fédérale Kathleen O’Malley, il y a une semaine. Il prévoit une indemnisation d’environ 200 000 dollars pour chaque patient qui a dû être réopéré en raison des résidus d’huile constatés sur les prothèses, résidus qui empêchent l’adhésion des prothèses de hanche ou de genou à l’os.

En contrepartie, les victimes qui acceptent l’accord global renoncent à toute action en justice contre Sulzer Merdica ou sa filiale américaine, Sulzer Orthopedics, dont le siège se situe à Austin au Texas.

Après la décision de la magistrate américaine, les plaignants ont disposé de cinq jours ouvrables pour accepter ou rejeter l’accord global. Selon le groupe suisse, seulement 0,4% des patients américains ont rejeté son offre d’indemnisation.

Néanmoins, le camp des dissidents est plus fourni que prévu. En effet, jusqu’à la semaine dernière, Sulzer Medica estimait qu’environ 50 patients repousseraient sa proposition, et non pas 132.

Une indemnisation insuffisante

L’avocat David Riggs indique à swissinfo que certaines victimes considèrent que l’indemnisation prévue par l’accord est très insuffisante. D’autant que, sur les 200 000 dollars que chaque patient doit recevoir aux termes de l’accord, quelque 40 000 dollars iront directement dans les poches de son avocat.

David Riggs, qui représente une dizaine de patients ayant, pour la plupart, accepté l’accord global, ajoute qu’aux Etats-Unis, une opération de la hanche revient à au moins 20 000 dollars et que le coût de toute opération visant à corriger la première peut aller jusqu’à 50 000 dollars.

Plusieurs de ces victimes, qui figurent parmi celles qui souffrent le plus des complications relatives aux prothèses défectueuses, peuvent donc espérer obtenir une indemnisation beaucoup plus élevée que 160 000 dollars par personne, en saisissant des tribunaux locaux.

Or, aux Etats-Unis, les jurys populaires assemblés dans les affaires de responsabilité civile des fabricants ont généralement tendance à accorder des indemnisations très substantielles aux victimes.

En outre, les tribunaux locaux sont plus généreux envers les plaignants que les tribunaux fédéraux. En août dernier, un jury de Corpus Christi, au Texas, a ainsi ordonné à Sulzer Orthopedics de payer plus de 15 millions de dollars à trois femmes ayant reçu des prothèses défectueuses. Même si l’appel de Sulzer Medica retarde le paiement.

Plus d’un milliard de francs suisses

Si des victimes ayant dénoncé l’accord global venaient à se voir accorder de telles indemnités, Sulzer Medica serait placé dans une position peu enviable aux Etats-Unis, non seulement sur le plan financier, mais aussi en ce qui concerne son image sur ce marché capital. Rien qu’en 2001, le contentieux a déjà coûté 1,19 milliard de francs suisses au groupe zurichois.

Sulzer Medica se dit confiant de pouvoir encore convaincre les 120 dissidents et leurs avocats d’accepter l’accord global. «Ce qui est sûr, c’est que ce chiffre de 132 peut encore diminuer», déclare Andy Bantel, porte-parole de Sulzer Medica à Zurich.

L’une des stratégies adoptées par Sulzer Medica pour convaincre est la menace. Après le verdict de Corpus Christi, Richard Scruggs, l’avocat américain de Sulzer Orthopedics, n’avait en effet pas caché que «la compagnie a mis à l’abri ses avoirs pour de nombreuses années, de sorte qu’il soit pratiquement impossible pour des plaignants comme ceux de Corpus Christi de passer à la caisse».

De son côté, Stephan Rietiker, patron de Sulzer Medica, a prévenu que «quelques autres verdicts de ce genre suffiraient à pousser Orthopedics à la faillite, ce qui ne laisserait absolument rien pour la majorité des patients».

Or, au cas où la filiale américaine de Sulzer se déclarerait en faillite et demanderait à bénéficier de la protection prévue par la loi connue sous le nom de Chapitre 11, les plaignants n’auraient aucune préséance dans la distribution des avoirs de la société.

«La banqueroute de Sulzer Orthopedics poserait de gros problèmes aux victimes, explique l’avocat David Riggs, dans la mesure où leurs prétentions seraient traitées avec le reste des revendications des créanciers, sans aucune priorité.»

Sulzer devient Centerpulse

Par ailleurs, Sulzer Medica a indiqué jeudi en fin de journée que la société allait changer de nom pour devenir Centerpulse. Dès le 1er juin, le spécialiste des prothèses et implants se dotera en effet d’un nouveau design pour sa marque et son logo.

Le changement d’identité sera soumis au vote de l’assemblée générale qui se tiendra vendredi. Centerpulse comptera six divisions: Biologics, Cardiac, Dental, Orthopedics, Spine-Tech et Vascular.

swissinfo/Marie-Christine Bonzom à Washington avec Pierre Gobet à Zurich

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