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La crise et l’ignorance pénalisent les handicapés

Le travail des handicapés reste peu développé en Suisse. Keystone Archive

La récession complique la tache des quelque 25'000 handicapés à la recherche d’un travail en Suisse. Les entreprises sont mal informées des possibilités dont elles disposent.

AGILE Entraide Suisse Handicap lance, cette semaine, une action intitulée «Du travail pour les handicapés».

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) recense près 10% de handicapés dans le monde. En Suisse, on en compte 700’000.

Selon une estimation, faite par les Offices cantonaux AI (Assurance invalidité), environ 25’000 handicapés cherchent du travail en Suisse.

Objectifs de la campagne

«L’objectif prioritaire est d’informer les entrepreneurs qu’il y a des possibilités d’employer des personnes handicapées», explique Claude Bauer, secrétaire romande d’AGILE, organisation faîtière des associations de handicapés.

Certains entrepreneurs le savent déjà. Mais, reconnaît Claude Bauer, il faut encore élargir le cercle. Et surtout vaincre des préjugés.

Car, de façon générale, les chefs d’entreprises ne connaissent pas les handicapés. Et donc, lance Claude Bauer, «face à l’inconnu, on a tendance à développer des réflexes de peur.»

Par ailleurs, les entrepreneurs ignorent un fait essentiel qui peut les aider à franchir le pas: ils peuvent obtenir d’une aide qui peut prendre différentes formes.

Ainsi, l’assurance invalidité peut prendre en charge des périodes de stage, de mise au courant, voire des périodes d’apprentissage ou de formation dans les entreprises.

L’Office AI va verser une indemnité journalière à la personne concernée. Ce montant correspond au salaire. Et cela dispense l’employeur de verser une rémunération à la personne handicapée.

Autre possibilité: la prise en charge par l’AI de l’adaptation du poste de travail. Par exemple, un écran d’ordinateur spécial pour une personne qui a de graves problèmes visuels.

Offensive sur le terrain

Si une telle campagne permet d’attirer l’attention et de susciter une prise de conscience, il reste néanmoins un travail au quotidien à effectuer dans les Offices AI.

Pour pallier la méconnaissance du monde économique dans ce domaine, le bureau du canton de Vaud a instauré au début de l’année un service spécial de sensibilisation.

D’abord, un coordinateur-emploi se rend dans les entreprises pour les informer sur les prestations de l’assurance invalidité.

Puis, il tente de nouer des contacts pour placer des personnes handicapées ou celles qui sont dans un processus de réadaptation.

Pour le moment, Dominique Dorthe, coordinateur-emploi vaudois, a principalement ciblé les petites et moyennes entreprises, notamment dans le domaine mécanique. Il s’attaque actuellement aux plus grandes entreprises, notamment de distribution comme Coop ou Migros.

Le maillon faible

Mais, il faut dire que l’actuelle crise économique ne facilite pas de tels placements. Une entreprise, qui n’a pas assez de travail, n’est pas en mesure de créer un poste spécifique pour une personne handicapée.

Et comme le constate Claude Bauer, quand une firme a des problèmes c’est «le maillon faible qui gicle». Et le handicapé a généralement plus de difficultés à trouver un autre emploi.

Cependant, Dominique Dorthe affirme «être très bien accueilli et rencontrer beaucoup d’intérêt et de sensibilité» lors de ses visites.

Son travail porte déjà ses fruits, puisqu’une dizaine de personnes ont été placées dans autant d’entreprises, sur un total de 70 sociétés visitées.

Pour le coordinateur-emploi vaudois, ce résultat est «bon». D’autant que des démarches sont en cours. Et certaines devraient donner des résultats positifs.

Les quotas, une solution?

M. Dorthe regrette que la loi ne comporte pas de mesures incitatives, comme en France. Chez notre voisin, une entreprise qui n’engage pas des handicapés doit payer une taxe.

«Alors en Suisse, explique-t-il, nous essayons de sensibiliser les employeurs sur le rôle social qu’ils ont à jouer. Nous tentons de démontrer l’apport humain du handicapé. Celui-ci est généralement un employé fidèle.»

Il arrive aussi, raconte-t-il, que la présence de handicapés réduise l’absentéisme. L’employé valide qui n’allait pas au travail pour un simple rhume adopte une autre attitude au regard des difficultés rencontrées par son collègue invalide.

L’instauration de quotas serait-elle une solution? Dominique Dorthe y est en tout cas favorable. «Cela ferait réfléchir les entreprises qui seraient par conséquent plus concernées.»

Pour sa part, Claude Bauer – secrétaire romande d’AGILE – craint qu’un tel système soit détourné. «Mettre une personne handicapée au fond d’un bureau et ne rien lui donner à faire, ce n’est pas satisfaisant. Le but, c’est quand même que la personne soit réellement intégrée.»

Le coordinateur-emploi du canton de Vaud défend aussi l’idée du stage. «Car, ainsi, l’employeur peut se rendre compte des qualités d’une personne. Et cela permet à celle-ci de reprendre pied avec le monde du travail.»

La quatrième révision de la loi sur l’assurance invalidité, qui entrera en vigueur le 1er janvier 2004, met un accent tout particulier sur le placement et la réadaptation professionnelle.

Et Dominique Dorthe espère que les Offices AI disposeront de davantage de moyens dans ce domaine.

swissinfo, Chantal Nicolet

– AGILE est l’organisation faîtière des associations de handicapés.

– L’action «Du travail pour les handicapés», lancée par AGILE Entraide Suisse Handicap, se déroule du 3 au 9 novembre.

– Cette semaine, qui a lieu dans toutes les régions linguistiques de la Suisse, est soutenue, entre autres, par le Secrétariat d’Etat à l’économie, la Suva, l’Union patronale suisse et l’Union suisse des Arts et Métiers.

– A cette occasion, une brochure a été distribuée tous azimuts, des spots sont diffusés à la télévision et un numéro vert est mis à disposition.

– 2003 est l’Année européenne des personnes handicapées.

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