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Le Gouvernement empoigne le dossier UBS

Hans-Rudolf Merz semble bien décidé à prendre les choses en mains. Reuters

En réponse aux critiques concernant sa gestion du conflit entre UBS et les Etats-Unis, le Conseil fédéral nomme une délégation stratégique de trois ministres. Ils se pencheront sur l'avenir de la place financière, du secret bancaire et du système fiscal suisses.

La délégation regroupe les ministres des Finances Hans-Rudolf Merz (également président de la Confédération), de Justice et Police Eveline Widmer-Schlumpf et des Affaires étrangères Micheline Calmy-Rey.

Elle sera épaulée par un ou des groupes de travail composés d’experts du droit, des banques, de l’économie et de la diplomatie. Des spécialistes américains seront aussi invités à y participer.

Son mandat: «défendre les intérêts de notre pays dans l’affaire qui secoue l’UBS aux Etats-Unis, mais aussi vis-à-vis de l’Union européenne (UE) et d’autres pays», a précisé Hans-Rudolf Merz devant la presse mercredi. Et de rappeler que garantir de bonnes conditions cadre à la place financière reste une priorité pour le Conseil fédéral.

Il sera donc également question dans ce cadre du secret bancaire, ainsi que de la politique des impôts. Interrogé sur la viabilité à terme de la distinction faite par Berne entre évasion et fraude fiscale, le grand argentier a estimé qu’il était trop tôt pour se prononcer.

Le secret bancaire tel que défini dans l’accord sur la fiscalité de l’épargne conclu avec l’UE demeure l’alpha et l’oméga de la Suisse à ce stade, a-t-il souligné.

Adaptations possibles

Hans-Rudolf Merz n’a toutefois pas exclu que cet accord soit adapté ou étendu à d’autres Etats. Il serait aussi envisageable que la Suisse taxe d’autres gains que les intérêts de l’épargne, par exemple les dividendes.

Le ministre n’a pas caché que la délégation a aussi pour tâche de préparer ces scénarios. Mais la balle est dans le camp de Bruxelles: «L’UE doit d’abord dire ce qu’elle veut».

La délégation entend fixer rapidement les objectifs stratégiques à atteindre. Leur concrétisation risque de prendre plus de temps, car elle dépendra des circonstances, notamment de l’avancement des procédures juridiques.

La stratégie comprendra plusieurs volets. En feront partie la visite lundi à Washington d’Eveline Widmer-Schlumpf et la participation de Hans-Rudolf Merz à une réunion, élargie, prévue mi- mars à Londres pour préparer le G20 d’avril, rencontre à laquelle la Suisse n’est toutefois pas invitée.

Pas de contacts avec Washington

Le président de la Confédération a admis ne pas avoir cherché à contacter l’administration Obama ces dernières semaines pour discuter de l’affaire UBS. Les banques sont les premières concernées, et non la Confédération, s’est-il justifié.

Hans-Rudolf Merz s’est voulu rassurant tout au long de son intervention sur le suivi de la situation par ses propres services et par le Conseil fédéral. Le gouvernement comprend la colère et l’inquiétude que cette affaire suscite dans l’opinion publique, a-t-il tenu à dire.

Les banquiers applaudissent

Les principaux concernés ont aussitôt salué la mise sur pied de cette délégation stratégique. Cela montre que le Conseil fédéral soutient les intérêts de la place financière helvétique, estime l’Association suisse des banquiers (ASB). Elle juge que la structure proposée est adéquate. L’important est que les banques et l’ASB soient incluses dans les discussions, a expliqué son porte-parole.

Satisfaction également de l’Association des banquiers privés suisses (ABPS). Son secrétaire général Michel Dérobert se dit partisan d’«une ligne relativement dure mais réaliste».

Selon lui, il faudra cependant éviter d’émettre prématurément des idées, de «réfléchir à haute voix». Car «ce sont des questions techniques et complexes, qui demandent des réponses techniques et complexes au-delà des slogans».

Il est donc positif que la délégation reste à un niveau exécutif et technique, et ne soit pas trop politisée. Il y a bien sûr une composante qui concerne les politiques, mais «le travail de détail dépasse leurs compétences techniques», relève Michel Dérobert.

swissinfo et les agences

Article 47. Même si les banques helvétiques ont toujours été réputées pour leur discrétion, le secret bancaire n’est inscrit dans la législation que depuis 1934. Actuellement, l’article 47 de la loi sur les banques punit celui qui le viole de l’emprisonnement jusqu’à trois ans ou d’une amende de 250’000 francs au plus.

Refuge idéal. A l’époque de son inscription dans la loi, le monde est en pleine dépression économique, mais la place financière suisse vient de vivre deux décennies très fastes. A la fin de la Première Guerre mondiale, le pays a une monnaie très forte et un taux d’imposition bas. Alliés à la stabilité politique, ces atouts en font un lieu de refuge idéal pour les capitaux du monde entier.

Gendarme. Ministre des Finances de l’époque, le catholique conservateur Jean-Marie Musy fait partie des pères spirituels du secret bancaire. En 1920 déjà, il déclarait que la Suisse ne devait pas jouer un rôle de gendarme contre la fuite des capitaux depuis les autres pays, en particulier depuis l’Allemagne.

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