Nouvelle cure d’amaigrissement pour La Poste
La Poste suisse supprimera entre 400 et 500 emplois dans les deux prochaines années. La réorganisation des offices devrait permettre d'économiser 50 millions de francs.
Les partis de droite sont nuancés alors que pour les syndicats et la gauche la restructuration est vouée à l’échec. Certains dans les milieux économiques estiment que la réforme ne va pas assez loin.
Le conseil d’administration de La Poste a accepté lundi à la mise en œuvre du projet Ymago. Celui-ci a été testé à la satisfaction du géant jaune durant ces trois dernières années, a indiqué La Poste.
Deux autres modèles étaient envisagés. Celui des offices de poste gérés par des privés doit faire l’objet de tests supplémentaires jusqu’à mi-2007. Celui des appareils automatiques a été abandonné.
Cette restructuration vise à améliorer le service à la clientèle et la rentabilité du réseau tout en assurant la desserte de base sur tout le territoire. Les offices de poste dit principaux assureront le travail administratif des succursales, afin de décharger le personnel de ces dernières.
Actuellement, les coûts non couverts du réseau atteignent plus de 400 millions de francs. La suppression de 400 à 500 emplois en deux ans sera négociée avec les syndicats d’ici le printemps.
Le directeur de La Poste Ulrich Gygi s’est toutefois engagé à reclasser dans l’entreprise le personnel licencié ou l’aider à trouver à un emploi chez des tiers.
Employeur presse-citron
Dans la presse dominicale, le président du Syndicat de la communication Christian Levrat menaçait de recourir à des actions de protestation, sans exclure la grève.
Dans l’ensemble, les syndicats estiment que le modèle d’agences prévu est d’ores et déjà voué à l’échec. Il s’agit d’un «pur projet de démantèlement visant à saper le réseau des offices de poste», estime le syndicat.
La Poste devient un employeur antisocial qui presse comme un citron son personnel. Les absences pour cause de maladie ont pris l’ascenseur ces dernières années, notamment pour cause de ‘burn-out’, écrit le syndicat.
Des manifestations spontanées
Des manifestations spontanées contre le projet de réorganisation se sont déjà déroulées mardi à Lausanne, Berne et Lugano.
A Lausanne, des militants ont distribué des tracts. A Berne, seuls quelques employés ont défilé. A Lugano, la manifestation a été marquée par l’intervention du sénateur Dick Marty, de passage sur les lieux.
«La rationalisation de La Poste est normale comme l’est celle de n’importe quelle autre entreprise, a dit le sénateur radical (PRD / droite). Le but de La Poste n’est pas de créer des emplois mais de fournir des prestations, ce qu’elle fait pleinement.»
Les réactions des partis
Le parti socialiste (PS) et les Verts accueillent avec scepticisme. Les deux partis de gauche estiment que la situation financière de La Poste est bonne et s’inquiètent à la fois des licenciements et d’une éventuelle diminution des prestations aux clients.
Le parti démocrate-chrétien (PDC / centre-droit) ne s’oppose pas avec virulence au projet du géant jaune mais se demande, lui aussi, si le service public restera assuré dans tout le pays et si le licenciement de 500 employés est réellement nécessaire.
Le PRD estime que cette décision dépend uniquement de La Poste qui doit décider si cette restructuration est bonne ou non pour elle et ses clients. Il reconnaît, en outre, que le géant jaune doit faire face à une concurrence toujours plus vive.
L’Union démocratique du centre (UDC / droite dure) se réjouit du plan présenté. Elle le considère comme «très sensé» et trouve que le licenciement de 500 employés n’a rien de «dramatique».
Allant dans le même sens, economiesuisse estime pour sa part le projet «trop timide», surtout en comparaison internationale.
swissinfo et les agences
En 2005, La Poste a réalisé un chiffre d’affaires net de 7’499 millions de francs et un bénéfice de 811 millions.
Le groupe est le second employeur du pays. En 2005, il offrait 41’073 emplois à plein temps contre 42’884 en 2004.
L’histoire de La Poste sous sa forme actuelle commence en 1995, quand le gouvernement décide de séparer les PTT (Poste Téléphone Télégraphe) en deux unités distinctes, à savoir La Poste et Telecom PTT (aujourd’hui Swisscom). La réforme entre en vigueur le premier janvier 1998.
En janvier 2001, La Poste annonce un premier plan de restructuration, qui prévoit la réduction des offices postaux de 3390 à 2500 pour une économie annuelle de 100 millions de francs.
En mai 2003, La Poste annonce que la distribution des lettres se fera via trois centres de tri
et six centres secondaires. 2390 emplois à temps complet sont supprimés.
Dès 2004, le marché postal est libéralisé progressivement. Aujourd’hui, La Poste détient encore le monopole sur les lettres jusqu’à 100 grammes.
En mai 2006, le gouvernement a demandé au Département fédéral des communications (DETEC) de préparer une nouvelle révision de la loi sur la poste. L’ex-régie fédérale pourrait ainsi se voir transformée en société anonyme. Il envisage aussi une libéralisation totale du marché postal, avec des garde-fous.
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