Quand les plantes soignent l’économie
Les plantes médicinales de l'arc alpin peuvent contribuer au développement des régions décentralisées.
Ce thème est au cœur des débats du 5e colloque international Médiplant qui se tient en Valais les 25 et 26 septembre.
«Le temps est loin où chacun cueillait ses petites plantes aux mille vertus dans les Alpes», lance Charly Darbellay, directeur du centre de recherche sur les plantes médicinales et aromatiques (Mediplant), collaborateur à la Station fédérale de recherche en production végétale de Changins et responsable de l’organisation de ce colloque.
Une véritable industrie de la culture est train de voir le jour. Ainsi, près de 300 producteurs de plantes médicinales et aromatiques sont enregistrés en Suisse.
Ils travaillent une surface de 150 hectares répartie principalement entre les Grisons, la région de l’Emmental, le Tessin et le Valais. Mais d’autres régions comme Lucerne et Soleure ont de petites productions également.
Un rendement important
«Mais si la surface paraît petite, précise le directeur, il ne faut pas oublier que le rendement de ces cultures est très dense et demande une main d’œuvre conséquente».
Quant à l’avantage de la culture, il n’est plus à démontrer.
En premier lieu, de nombreuses plantes sont protégées de la «sur-cueillette» qui met la biodiversité en danger.
«Mais surtout, l’industrie exige des plantes homogènes et de qualité constante», admet Charly Darbelllay.
Seule une sélection rigoureuse des plants liée à une culture soignée permet une production homogène et une récolte de plantes très riches en principes actifs.
Et cela fonctionne. Le Valais, par exemple, est devenu un gros producteur de sauge, de thym, de menthe, de mélisse, d’Edelweiss, les cinq plantes les plus cultivées sur environ une quarantaine d’espèces.
Une production qui, par ailleurs, se réalise uniquement selon des méthodes d’agriculture biologique ou intégrée.
Pôle de compétence et forte demande
Le développement semble donc inévitable. «Il faut dire, ajoute le directeur, que la Suisse et particulièrement le Valais, disposent d’un véritable pôle de compétence dans ce domaine».
Car, entre la station de recherche agronomique de Changins (RAC), et la société de recherche Mediplant, les agriculteurs peuvent aisément trouver ce dont ils ont besoin pour se lancer dans ce secteur de production.
D’autant plus que la demande s’accentue de jour en jour.
«La progression dans ce secteur est actuellement à deux chiffres, précise Charly Darbellay. La demande émane de l’industrie pharmaceutique, mais surtout de l’agroalimentaire et de la cosmétique».
Un phénomène qui s’explique par l’attitude des consommateurs qui veulent vivre de plus en plus sainement et se procurer des produits de qualité, que ce soit des herbes aromatiques ou médicinales.
L’exemple de Valplantes
L’exemple de la société coopérative Valplantes en Valais qui regroupe 110 producteurs actifs est éloquent. Par ailleurs, elle donne une idée de la situation puisqu’ elle réalise le 50% d’une production suisse qui oscille autour de 300 tonnes, selon les chiffres de l’Office fédéral de l’agriculture (OFAG).
«Créée en 1984, la société Valplante réalise déjà une production annuelle de 100 tonnes en 1990», explique le gérant de la société Fabien Fournier. Et d’ajouter: «cette production a pratiquement doublé en 10 ans pour passer à 190 tonnes en 2002».
Cela dit, la totalité de la production suisse ne couvre que le dixième de la demande de l’industrie qui va se fournir pour le reste à l’étranger.
«Il faut spécifier que nos coûts de production sont encore élevés, précise Fabien Fournier, mais ils devraient diminuer grâce à des projets de mécanisation des cultures, ce qui devrait inciter l’industrie à accentuer sa demande en Suisse même».
Inutile de dire, dans ces conditions que la production de la société coopérative valaisanne n’a aucun soucis d’écoulement, bien au contraire.
La preuve, un fameux fabricant de bonbon aux herbes des Alpes dont le nom est désormais connu sur toute la planète est en plein essor. Il achète 70 tonnes d’herbes aux valaisans pour les fabriquer.
Les autres fortes demandes à la coopérative concernent les infusions et tisanes, ainsi que le fameux thé aux herbes des Alpes lancé en 1997 et diffusé par une grande chaîne suisse. Il s’en vend aujourd’hui 1,5 million de litres par année.
Collaboration transfrontalière.
Toutefois, il y a encore beaucoup à faire pour optimiser le développement de ces cultures. Et selon le vieil adage «l’union fait la force», ce colloque abordera les avantages que pourrait apporter une meilleure synergie entre les régions alpines concernées par ce genre de culture, soit la France et l’Italie et la Suisse.
Le potentiel est en effet énorme. «Lorsque l’on considère tous les projets de développement liés à cette branche, dans ces trois pays, il n’y a pas de raison qu’une grande synergie ne puisse s’en dégager », confirme Charly Darbellay.
Cette dynamique doit également se faire en Suisse. «Le Tessin, explique Charly Darbellay est pionnier dans le domaine de la phytothérapie (thérapie par les plantes), grâce au Dr Ario Conti».
Un savoir-faire qui intéresse vivement l’Institut de recherche Mediplant et qui peut avoir des répercussions sur le développement de cette culture en Valais.
«Cela dit, conclut le directeur de Mediplant, il ne faut pas tomber dans l’euphorie et penser que ces cultures vont compenser tous les problèmes liés à l’agriculture de montagne. Cependant, elles seront sans doute un excellent complément pour des agriculteurs qui veulent diversifier leurs activités».
swissinfo, Jean-Louis Thomas
Organisé à Evolène en collaboration avec l’Etat du Valais, la station fédérale de recherche en production végétale de Changins (RAC), le centre de recherche sur les plantes médicinales et aromatiques (Mediplant), ce séminaire doit attirer dans le val d’Hérens une centaine de congressistes venus de différents pays européens.
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