Une loi qui tombait au mauvais moment
Les Suisses - à commencer par les Romands - ne veulent pas de libre concurrence sur le marché de l'électricité.
Dimanche, plus de 52% des votants ont refusé une loi sur la libéralisation progressive dans ce secteur.
Ce résultat est un vrai succès pour les milieux syndicaux qui avaient lancé le référendum. En effet, avec le soutien du gouvernement et de la droite et une gauche divisée, la nouvelle loi devait mathématiquement passer la rampe.
Un dossier compliqué
Les citoyens n’ont guère pu se fier aux arguments des uns et des autres pour se faire une opinion. Dans un dossier aussi technique que celui du marché de l’électricité, il était difficile de vérifier la véracité des arguments, d’autant qu’ils étaient parfois contradictoires.
Un exemple: la libéralisation ratée de la Californie. Pour les uns, il s’agissait d’une parfaite illustration des dérives des lois du marché. Pour les autres en revanche, la nouvelle loi suisse aurait précisément permis d’éviter une telle catastrophe.
Une grande partie du public aura par ailleurs certainement fait l’amalgame entre privatisation et libéralisation du marché. La campagne s’est dès lors largement orientée sur le terrain de la défense du service public, bien que celui-ci ne fût pas directement mis en danger.
Un modèle en crise
Finalement, le vote se résumait en une question de confiance ou de défiance envers le marché libre. Or, la situation en Suisse et, plus généralement en Europe, ne semble plus propice au libéralisme.
Des exemples récents ont montré au public que les sociétés soumises aux lois de la libre concurrence peuvent facilement courir à la catastrophe. En Suisse, il suffit de penser à la déroute de Swissair l’an dernier.
A l’étranger, les chiffres catastrophiques présentés il y a quelques jours par France Télécom – des milliards de pertes – ou la déconfiture d’Enron aux Etats-Unis ne militent pas non plus en faveur du libre-marché.
Ce d’autant que la situation économique actuelle est très incertaine. Dans ce contexte, les Suisses n’ont donc pas voulu jouer aux apprentis sorciers dans un domaine aussi sensible que l’approvisionnement électrique.
Une leçon pour l’avenir
Le vote de dimanche marque un sérieux revers pour le ministre suisse de l’énergie et des communications Moritz Leuenberger. Mais aussi pour la majorité bourgeoise du Parlement.
Or, d’autres projets de libéralisation (Poste, gaz, etc) sont encore dans les tiroirs de Moritz Leuenberger. Mais, au vu de ce qui c’est passé dimanche, le ministre serait bien inspiré d’attendre avant de la soumettre au public.
swissinfo/Olivier Pauchard, Palais fédéral
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