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Vers une nouvelle centrale nucléaire en Suisse?

La centrale nucléaire de Beznau 2, pendant des travaux de révision. Keystone

Le maintien de l'option nucléaire par le gouvernement donne des ailes au lobby de l'atome, qui annonce pour bientôt le dépôt d'une demande d'autorisation pour une nouvelle centrale.

Parallèlement, les environnementalistes maintiennent leur rejet de l’atome et les jeunes des grands partis s’unissent contre les centrales à gaz.

Le président de l’Entente suisse pour une politique énergétique raisonnable (ESPER), Rolf Schweiger, table sur le dépôt d’une demande d’autorisation pour une nouvelle centrale nucléaire dans les dix-huit mois.

Samedi à la radio alémanique DRS, le conseiller aux Etats (sénateur) radical a ajouté que les citoyens peuvent se déterminer sur l’option atomique d’ici 2012. D’ici là, une demande d’autorisation de construire devrait aussi être sur la table.

Une nouvelle centrale devrait entrer en service d’ici 2020 selon le calendrier du lobby de l’atome. Pour tenir ces délais, Rolf Schweiger veut raccourcir les procédures: «Un Etat de droit doit également être efficace», a-t-il fait valoir.

Atel dans la course

Le groupe Atel veut mettre sur pied d’ici la fin de l’année avec des partenaires – Axpo, les Forces motrices bernoises (FMB) ou des villes – un consortium pour la planification et la construction d’une ou plusieurs nouvelles centrales nucléaires.

Une demande d’autorisation générale pourrait être déposée en 2008 ou 2009 si Beznau (AG) ou Gösgen (SO) est retenu comme site d’implantation, a-t-il pronostiqué. Il faudrait compter dix à quinze ans jusqu’à la mise en exploitation, a estimé dimanche le patron d’Atel, Giovanni Leonardi, dans une interview à la «SonntagsZeitung».

Eduquer par le porte-monnaie

Cette prise de position intervient trois jours après la décision du gouvernement fédéral de réorienter la politique énergétique suisse.

Pour parer à la pénurie qui se dessine, la nouvelle stratégie repose sur quatre piliers: les centrales électriques, le renforcement de l’efficacité énergétique, la promotion des énergies renouvelables et la collaboration internationale.

Le ministre de l’Energie Moritz Leuenberger privilégie les incitations fiscales plutôt que les appels au sens moral de la population. «On n’éduque les gens que par le porte-monnaie», a-t-il déclaré vendredi soir à la télévision alémanique (SF).

De son côté, Rolf Schweiger a estimé que les économies d’énergie ne suffisent pas. Il juge que la Suisse affiche déjà une efficience énergétique relativement élevée, quand bien même la gauche se plaît à la qualifier de république bananières en la matière, a-t-il déclaré.

Nucléaire inutile pour le WWF

De son côté, le WWF a également réagi samedi. Son directeur, Hans-Peter Fricker, a indiqué dans le «Bund» de Berne que la Suisse n’a pas besoin de nouvelles centrales nucléaires si toutes les mesures d’économies et d’efficience énergétiques sont prises.

Certes, la consommation d’électricité globale a crû ces dernières années, mais cela n’est pas une fatalité. Le WWF est convaincu que cette tendance peut être brisée, notamment en introduisant des taxes incitatives et en relevant les prix.

Et il y a aussi les progrès techniques. M. Fricker cite l’exemple du chauffage des bâtiments. Les Suisses vivent dans des surfaces plus grandes, mais les dépenses d’énergie n’ont pas augmenté car on utilise désormais des technologies plus efficaces.

Enfin, Hans-Peter Fricker, qui est pourtant représentant du Parti radical favorable à l’atome, met en garde contre cette technologie, «dangereuse et tout sauf durable». Il s’étonne de la légèreté avec laquelle ses partisans traitent de l’énergie nucléaire.

Les jeunes unis contre les centrales à gaz

ALor que leurs aînés ont déjà réagi durant la semaine, de leur côté, les jeunesses des partis politiques sont entrées dans le débat.

C’est la construction de centrales à gaz décidée par le Conseil fédéral qui a provoqué l’union sacrée des jeunesses des partis démocrate-chrétien, socialiste et radical, mais aussi de la droite dure de l’Union démocratique du Centre ou des Verts.

La jeunesse a compris l’urgence et s’unit, a déclaré l’écologiste Aline Trede vendredi face aux médias. Le dernier rapport sur le climat de l’ONU est clair et vouloir émettre des millions de tonnes de CO2 supplémentaires relève de la mauvaise plaisanterie, a-t-elle ajouté.

Adrian Michel, des Jeunes radicaux, reproche aux centrales à gaz de coûter cher et de n’être qu’une «fausse solution».

Les Jeunes socialistes considèrent, eux, que cette option transitoire relève «de la cosmétique». Leur présence diminuera la pression sur la recherche en direction d’autres solutions et elles réchaufferont considérablement le climat, a regretté Sebastian Dissler.

Le communiqué conjoint est une première en Suisse, même si la chaise du représentant des Jeunes de l’Union démocratique du centre est restée vide durant la conférence de presse.

swissinfo et les agences

Mercredi dernier, le gouvernement a décidé de réorienter la politique énergétique du pays pour éviter tout risque de pénurie.

Sa nouvelle stratégie repose sur quatre piliers: une meilleure efficience énergétique, la promotion des énergies renouvelables, la construction de nouvelles grandes centrales électriques et une collaboration internationale accrue.

Le Conseil fédéral estime inévitable la construction d’une nouvelle centrale nucléaire. En attendant, il préconise la construction de nouvelles centrales à gaz.

La Suisse dispose de 5 centrales nucléaires: Beznau 1 et 2 (Argovie, entrées en fonction en 1969 et 1972), Mühleberg (Berne, 1972), Gösgen (Soleure, 1978) et Leibstadt (Argovie, 1984).

Le nucléaire représente 38% de la production annuelle moyenne d’électricité (jusqu’à 45% en hiver). La moyenne annuelle européenne est de 33%.

Les centrales nucléaires suisses arrivent en fin de vie. Mais la nouvelle Loi sur l’énergie nucléaire stipule que la construction de nouvelles centrales est soumise au référendum facultatif.

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