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A la tête d’un colosse syndical

Renzo Ambrosetti, co-président du nouveau syndicat UNIA. swissinfo.ch

La fusion de quatre organisations de travailleurs a donné naissance à UNIA, le plus grand syndicat de l’histoire suisse.

Interview avec Renzo Ambrosetti, co-président du nouveau syndicat avec Vasco Pedrina.

Le nouveau syndicat interprofessionnel UNIA résulte de la fusion entre le SIB (industrie et bâtiment), la FTMH (industrie, construction et services), unia (tertiaire) et la FCTA (vente, commerce, transports et alimentation).

Unia comptera plus de 200’000 membres et représentera les intérêts de pratiquement tous les employés de la construction, des machines et du tertiaire, soit environ un million de travailleurs.

Rencontre avec le co-président du nouveau syndicat et ancien président de la FTMH, Renzo Ambrosetti.

swissinfo: Vous êtes désormais à la tête d’un géant syndical. Comment vous sentez-vous dans cette position?

Renzo Ambrosetti: C’est un moment de joie. Bien sûr, je sens aussi le poids d’une lourde responsabilité. Les attentes des membres d’UNIA et de la population sont élevées.

Nous sommes conscients d’être observés avec attention et une certaine appréhension par les employeurs. Ceci nous fait penser que nous sommes sur la bonne voie. Si nous suscitions l’indifférence de nos partenaires sociaux, ce serait le signe que nous nous sommes trompés.

swissinfo: Pour les syndiqués, qui ont convergés vers UNIA, que signifie cette fusion?

R. A.: Pour eux, il y aura de nombreux avantages. Le nouveau syndicat a des objectifs stratégiques clairs.

Avant tout, nous voulons être encore plus proches de nos membres sur le poste de travail et dans les différentes régions du pays.

Unir deux grandes structures syndicales – sans compter les plus petits syndicats – nous permet de dégager d’importantes synergies.

Sur tout le territoire suisse, nous aurons environ 100 secrétariats. Les prestations que nous avons fournies jusqu’ici à nos membres seront garanties. Mieux: nous espérons les élargir.

Ensuite, nous voulons aussi être plus actifs dans le domaine des contrats collectifs de travail. D’une part, il s’agit de consolider et améliorer la couverture contractuelle là où elle existe déjà. D’autre part, nous voulons intervenir dans les secteurs qui ne bénéficient pas d’une protection suffisante.

Je pense en particulier au secteur tertiaire. Un secteur dans lequel le travail auxiliaire est très répandu et où les employés pourraient bénéficier de la présence d’un syndicat. De plus, c’est un secteur en pleine expansion.

swissinfo: Vous parlez de la naissance d’UNIA comme d’un projet stratégique. Les motifs n’étaient-ils pas aussi financiers?

R. A.: Non, la fusion n’est pas liée à des motifs financiers, contrairement à ce qui s’est produit dans de nombreux autres pays européens.

A la FTMH, nous avions de bonnes «réserves de guerre» et le SIB également. Nous aurions pu continuer d’agir séparément durant des dizaines d’années encore. Mais nous n’aurions jamais pu atteindre les objectifs stratégiques que j’ai mentionnés.

Dans tous les cas, lorsqu’on parle de fusion, il ne faut pas se l’imaginer comme dans une entreprise privée. Il ne s’agit pas d’une décision prise à huis-clos par un conseil d’administration. Nous avons suivi un processus démocratique, accepté par la base.

C’est pour cette raison qu’on devrait parler d’intégration plutôt que de fusion.

swissinfo: Avant la naissance du projet UNIA, on a beaucoup parlé des différences de culture entre la FTMH – attachée à la paix du travail – et le SIB – plus combatif. Ces différences existent-elles encore? Et si oui, quelle est leur influence sur UNIA?

R. A.: Ce sont des lieux communs, même s’ils ont quelques racines historiques. Le SIB respecte lui aussi la paix du travail autant que possible. Et la FTMH a démontré sa capacité de mobilisation et de lutte, ces dernières années.

Le pari d’UNIA – et nous allons gagner – est de réunir ces deux cultures. Elles vont collaborer, non de manière à ce que l’une exclue l’autre, mais que la nouvelle unité prenne le meilleur des différentes identités, des diverses expériences des syndicats qui la composent.

Ces dernières années, nous avons travaillé ensemble, nous nous sommes soutenus. Certaines craintes et préjugés, qui existaient effectivement, ont disparu. Les militants se sont aussi rendu compte que les problèmes ne sont pas les mêmes pour tous.

swissinfo: Vous dites que le nouveau syndicat ne laisse pas les employeurs indifférents… Pensez-vous qu’avec UNIA les rapports entre partenaires sociaux vont changer?

R. A.: Cela dépend. Je suis convaincu qu’avec les employeurs intelligents, qui se rendent compte de l’utilité d’un syndicat représentatif, les relations continueront à être correctes.

Par contre, nous aurons des problèmes avec les idéologues du néolibéralisme qui veulent briser les droits acquis. Nous aurons des difficultés avec la droite dure et avec ces secteurs bourgeois – présents dans les associations patronales – qui se battent contre nous par principe.

J’espère que les associations patronales ne comptent pas trop de gens qui cherchent la confrontation pure et dure. Parce que s’ils veulent le conflit, nous sommes tout à fait capables de le gérer. Mais à moyen et long terme une telle confrontation pénalise tout le monde.

swissinfo: Désormais, deux représentants de la minorité suisse de langue italienne se trouvent à la tête d’UNIA: vous et Vasco Pedrina. Est-ce un hasard ou y a-t-il une raison plus profonde?

R. A.: Le hasard a joué un rôle. J’ai été le premier tessinois président de la FTMH en 116 ans d’histoire syndicale. Au SIB, la situation est différente. Les membres de langue italienne ont un poids important. Vasco Pedrina est déjà le deuxième président tessinois.

Dans mon cas, je crois que le fait d’être un Suisse italien qui parle les trois langues nationales a donné l’image d’un modèle d’intégration.

Et puis, issus d’une culture minoritaire, Vasco Pedrina et moi avons un atout commun: l’habitude de négocier avec la majorité alémanique.

Interview swissinfo: Andrea Tognina
(Traduction de l’italien: Alexandra Richard)

UNIA compte plus de 200’000 membres
Environ 900 employés
Une centaine de secrétariats régionaux
Le syndicat représente un million de travailleurs

Le nouveau syndicat interprofessionnel UNIA résulte de la fusion entre le SIB (industrie et bâtiment), la FTMH (industrie, construction et services), unia (tertiaire) et la FCTA (vente, commerce, transports et alimentation).

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