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La Suisse, un test pour le populisme européen?

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Philip Schaufelberger

Dans la politique d’aujourd’hui, il est de bon ton de débattre de la manière de stopper ou de combattre «la montée du populisme». Mais la solution ne consisterait-elle pas au contraire à laisser parler les populistes, à les encourager et – lorsqu’il s’agit de démocratie directe – à les laisser faire appel au peuple autant qu’ils le souhaitent?

Ces cent dernières années, l’instabilité politique dans les démocraties occidentales a souvent été liée au populisme. La recherche d’un «remède» contre ce que l’establishment perçoit comme un abus des institutions démocratiques est même plus ancien encore.

Mais pourquoi ce débat est-il si difficile et si durable?

Le populisme est un terme difficile à cerner. Comme il ne peut pas vraiment être mesuré, on se retrouve souvent avec un assortiment de définitions, la plupart d’entre elles s’accordant toutefois sur le fait qu’il s’agit d’un style politique opposant une «élite» moralement en faillite à un «peuple» opprimé, ignoré ou trompé.

Les politiques critiquent les populistes en estimant que ceux-ci promettent des solutions simplistes à des problèmes complexes comme l’immigration, la diversité culturelle et le changement sociétal. Les populistes estiment pour leur part que le populisme est un terme fourre-tout utilisé par les élites pour rejeter les arguments qu’elles n’aiment pas.

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Mais au-delà de la sémantique, c’est le débat qui compte: IDEA, un groupe de recherche suédois, constate que les périodes pendant lesquelles les populistes parviennent à entrer réellement au gouvernement sont des périodes de déclin de nombreux aspects de la santé démocratique comme la liberté d’expression ou l’engagement de la société civile.

Or, on vit actuellement une telle période. Bien qu’une étudeLien externe parrainée par la Commission européenne estime que le «pic de populisme» a désormais été atteint, le fait est que les partis populistes ont plus que triplé leurs électeurs sur le continent au cours des deux dernières décennies.

Et donc, même si l’idée de gouverner avec des groupes comme le Rassemblement national en France ou le Parti de la liberté aux Pays-Bas semble probablement effrayante pour de nombreux centristes ou modérés, il n’y a peut-être pas le choix.

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L’exemple suisse

Comme d’habitude en matière de politique, la Suisse se distingue quelque peu dans ce débat: si le pays est souvent considéré comme un modèle de stabilité et le champion mondial de la démocratie (directe), il est également jugé très populiste, et ce depuis un certain temps.

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La Suisse au cinquième rang européen pour le populisme autoritaire

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Les trois dernières décennies ont vu une forte augmentation du succès des mouvements populistes dans le pays, principalement de l’Union démocratique du centre, dont la force lors des élections fédérales est passée de 12% en 1991 à un pic de 29,4% en 2015.

Malgré les gains importants réalisés par les Verts – parfois eux-mêmes qualifiés de populistes par le passé – lors des élections fédérales de l’année dernière, l’Union démocratique du centre reste le parti le plus fort au Parlement en 2020.

Mais comment la Suisse a-t-elle réussi à éviter l’instabilité politique et la rhétorique enflammée qui sont associées aux groupes populistes dans d’autres pays occidentaux? La démocratie directe pourrait jouer un rôle, selon les experts.

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Par ailleurs, la démocratie directe encourage le populisme en permettant d’inscrire à l’ordre du jour des idées qui seraient bloquées dans un autre système. Les citoyens peuvent refuser des lois et voter jusqu’à quatre fois par an sur des initiatives populaires visant à modifier la constitution, et ainsi contourner les intérêts des élites.

Mais pour cette même raison, c’est-à-dire la sollicitation régulière des citoyens pour participer au processus politique, la démocratie directe tempère également le populisme. Les électeurs suisses, habitués aux votes et aux campagnes politiques, ont de nombreuses opportunités de faire entendre leur voix: ainsi, les questions «remontent à la surface plus rapidement, plus clairement, et doivent être résolues», comme le relève le politologue Claude Longchamp. Ailleurs, les problèmes pourraient être laissés sans réponse et s’envenimer.

Enfin, bien sûr, le système suisse se caractérise par la «formule magique», ce qui signifie que les principaux partis du pays sont représentés au sein du gouvernement, indépendamment de leur positionnement.

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Ainsi, alors qu’ailleurs les groupes populistes sont vilipendés ou ostracisés, en Suisse, l’Union démocratique du centre est un membre légitime et de longue date du gouvernement et y travaille de manière pragmatique avec les autres partis – plutôt que de fulminer derrière un cordon sanitaire.

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Une équation politique basée sur la formule magique

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