La Suisse, eldorado des biotechnologies
Pascal Couchepin, ministre de l'économie, s'est déplacé en personne mardi pour l'inauguration d'un centre biotech à Zurich.
Dans ce domaine d’avenir, la Suisse n’a rien à envier aux plus grands et crée davantage de nouvelles entreprises que les Etats-Unis.
C’est un bâtiment de cinq niveaux, érigé par un mécène sur une ancienne friche industrielle de la banlieue zurichoise. Pour l’heure, ils ne sont que 250 à y travailler, mais d’ici dix ans, ce nouveau «Biotech Center» pourrait avoir généré jusqu’à 3000 emplois.
Parmi les quatre entreprises qui y ont élu domicile, Cytos, spécialisée dans les traitements contre les allergies et Prionics, mondialement connue pour avoir mis au point le test de dépistage de la maladie de la vache folle.
Quatre pôles nationaux
Cette nouvelle implantation vient encore renforcer le biopôle zurichois, formé de jeunes entreprises issues pour la plupart de l’Ecole polytechnique (EPFZ) ou de l’Université.
Mais la ville qui vient de fêter un nouveau Prix Nobel – attribué au début du mois au biophysicien Kurt Wüthrich – n’est pas la seule à revendiquer le titre de capitale suisse des biotechnologies.
La région bâloise, la région lémanique, et, dans une moindre mesure, le Tessin, sont également sur les rangs.
Bâle: de la chimie au biotech
Bâle, qui a vu naître la chimie suisse, travaille depuis des années à sa diversification dans les biotechnologies.
En 1996 est né le programme transnational BioValley Basel, mais pour l’heure, c’est surtout la France voisine qui en a profité. Avec 120 laboratoires pharmaceutiques, l’Alsace rivalise désormais avec la région parisienne.
Toutefois, la décision récente de Novartis de déplacer une partie de sa recherche aux Etats-Unis devrait réveiller les futurs entrepreneurs locaux du biotech.
La tenue de deux congrès internationaux sur les sciences de la vie la semaine dernière à Bâle constitue à cet égard un signe positif.
Les Latins ne sont pas à la traîne
Avec Serono, la région lémanique détient quant à elle une belle carte de visite dans le domaine du biotech.
Mais le numéro trois mondial de la branche n’est que l’arbre qui cache la forêt. Sous l’impulsion des deux Universités de Genève et de Lausanne et de l’Ecole polytechnique est né le pôle BioAlps, formé – comme les autres – essentiellement d’entreprises issues des Hautes Ecoles.
Ensemble, les trois régions du Léman, de Bâle et de Zurich concentrent 80% des entreprises biotech du pays. Mais depuis peu, le Tessin affirme lui aussi ses ambitions dans ce domaine.
Dans le sillage de deux instituts de recherche médicale de Bellinzone vient de naître un nouveau «Biopolo Ticino», qui vise rien moins que de devenir le quatrième haut lieu des biotechnologies en Suisse.
Leader mondial
Ainsi, avec 139 enseignes recensées à fin 2001, la Suisse se classe leader mondial pour le nombre d’entreprises biotech par tête d’habitant. Et le secteur semble promis à une belle croissance, puisqu’un tiers de ces sociétés ont moins de cinq ans d’âge.
Et encore, ce classement ne tient-il compte que des firmes actives uniquement dans les biotechnologies. Si l’on y ajoute les entreprises qui entretiennent un département biotech en plus de leurs autres activités, le chiffre passe à 259.
Ce dynamisme n’est pas fait pour surprendre Xavier Comtesse, directeur romand de la Fondation Avenir Suisse.
«On l’ignore souvent, mais il se crée en Suisse pas loin de 11 000 entreprises par année. Par rapport à la population du pays, c’est plus qu’aux Etats-Unis», souligne celui qui fut le premier directeur de la Maison suisse de la science à Boston.
Question de température
Convaincu de l’excellence du savoir-faire helvétique, Xavier Comtesse envisage donc l’avenir du biotech «made in Switzerland» avec optimiste.
«Le terreau est très favorable dans notre pays», estime le numéro deux d’Avenir Suisse. A une réserve près toutefois: une certaine «tiédeur» du climat qui règne dans les Hautes Ecoles helvétiques.
«Ce n’est pas une question de taille critique, explique Xavier Comtesse. Le fameux Massachusetts Institute of Technology est plus petit que l’EPFZ. C’est plutôt une question de température critique, de climat et d’émulation.»
Une réserve qui rejoint finalement celle de Pascal Couchepin. Mardi, lors de l’inauguration du Biotech Center zurichois, le ministre de l’économie a enjoint les chercheurs suisses à ne pas s’endormir sur leurs lauriers, «afin que le pays tienne encore sa position de leader dans dix ans.»
swissinfo/Marc-André Miserez
L’industrie biotech en Suisse (chiffres 2001):
139 entreprises
Chiffre d’affaires global: 3,8 milliards de francs
Dépenses de recherche et développement: 872 millions de francs
Effectifs: 8875 collaborateurs
– Le terme biotechnologie désigne l’utilisation d’organismes vivants dans la mise au point d’aliments, de médicaments ou d’autres produits utiles.
– Le domaine est très vaste, de la forme ancestrale qu’est l’utilisation des levures en boulangerie aux développements futuristes comme le génie génétique ou le clonage.
– En Suisse, l’industrie biotech se concentre surtout sur le secteur pharma et sur les équipements de laboratoire.
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