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A Zurich, les Hongkongais claquent la porte

Les exposants asiatiques présents à Zurich ont plié bagage jeudi après-midi. La décision de les autoriser à travailler à partir de dimanche a été jugée insatisfaisante.

Des actions judiciaires ont été annoncées. Pour le Salon, c’est un «désastre». Reportage.

Ce fut d’abord de l’incompréhension. Depuis leur arrivée en Suisse, les délégués asiatiques se demandaient quelle mouche avit piqué les autorités helvétiques.

«Vous savez, explique Lalu Daswani, les gens de Hong Kong sont raisonnables. Ils auraient compris une annulation, mais avant de venir en Suisse.»

Et, dans halles zurichoises du Salon, l’incompréhension s’est très vite transformée en colère chez les exposants venus d’Asie.

Des stands désertés

Jeudi matin, les employés des stands regardent passer les rares visiteurs devant leurs vitrines vides.

A côté des rangées dédiées à Hong Kong (qui occupent quelque 2000 personnes pour 317 des 786 stands installés à Zurich), le contraste avec les riches travées espagnoles est saisissant.

Un commerçant a trouvé des parades et a affiché sur sa porte: «Désolés, nous ne pouvons pas faire du commerce avec vous. Si nos produits vous plaisent, laissez votre carte de visite dans la boîte ci-dessous, merci.» La boîte contient une dizaine de cartes.

«Un non-sens total»

«La décision gouvernementale est un non-sens total, dit le gérant de ce stand, qui vient à la Foire de Bâle pour la septième fois. Nous ne pouvons pas travailler, mais nos compatriotes ou d’autres Asiatiques peuvent nous visiter, ou voyager dans le pays!»

«Si nous nous installions devant le bâtiment, avec nos produits, nous trouverions nos clients, au moins!» Ce gérant affirme avoir consacré 20 000 dollars américains à son voyage en Suisse.

Les exposants se plaignent de l’effet désastreux de l’annonce suisse. Jeudi matin, les clients croient que les stands sont déjà fermés et ne viennent pas.

Dommages et intérêts

En début d’après-midi, une lettre circule avant la réunion d’information prévue à 14h30, décrivant la décision suisse comme «extrêmement discriminatoire».

Quelques exposants demandent même à leurs collègues s’ils sont prêts à former un comité pour réclamer des dommages et intérêts et s’ils seraient d’accord de partir, même au cas où le gouvernement changerait d’avis.

Mais la Suisse ne changera pas d’avis. Et, vers 15 heures, lorsque la direction du Salon annonce que les exposants pourront commencer à travailler dimanche, après deux jours d’examens médicaux, elle est accueillie plutôt froidement.

Ueli Born se fait même copieusement huer par plus de 500 personnes rassemblées dans la salle de conférences.

«Money back»

«Go home», crient ironiquement quelques personnes, avant de scander, suivis par toute la salle: «Money back, money back!».

Frederick Lam, directeur adjoint du ‘Hong Kong Trade Development Council’ (HKTDC) prend alors la parole. «Il semble que ce soit la décision définitive des autorités suisses et nous en sommes très insatisfaits.» Applaudissements.

«Nous n’avons plus qu’une chose à faire: nous retirer de cette foire.» Déluge d’applaudissements.

Le directeur annonce encore que le HKTDC aidera à trouver des solutions pour réserver des billets d’avion avant de conclure: «Les hommes d’affaires suisses seront toujours les bienvenus à Hong Kong et nous espérons qu’ils viendront nombreux».

Les gens se lèvent et, moins d’une heure après, un cortège d’exposants quitte les halles. Déjà très vides, les travées des zones réservées à Hong Kong, la Chine et Singapour, qui ont suivi la décision, le sont encore davantage.

Lobbying suisse?

En coulisses, certaines personnes livrent leur propre explication. «Les Hongkongais ne se sont jamais sentis les bienvenus en Suisse», dit cette journaliste spécialisée écrivant pour un magazine de Hong Kong.

«L’industrie horlogère helvétique nous a toujours vu comme une concurrence. Beaucoup de gens pensent que c’est cette industrie qui a fait du lobbying auprès du gouvernement suisse. Mais celui-ci s’est ridiculisé avec sa décision.»

Lalu Daswani rappelle aussi que beaucoup de Hongkongais ont renoncé à venir en Suisse après la décision de diviser sur deux sites les marques (à Bâle) et les stands nationaux (à Zurich).

Une foire en Allemagne?

Le HKTDC a dû faire une campagne intense de persuasion pour convaincre les exposants de ne pas renoncer à la Suisse. «Beaucoup de nouveaux se sont en outre joints à la délégation. Sûrement pour la dernière fois. Nous avons été trop maltraités par les Suisses.»

L’idée de créer une nouvelle foire ailleurs, «dans un pays ami, peut-être l’Allemagne», revient chez plusieurs interlocuteurs. Qui ont annoncé, par la voix du directeur Lam, que des actions légales seraient lancées pour demander réparation.

Pris à parti par Lalu Daswani après l’annonce de la décision, Ueli Born tente, comme, il peut d’expliquer la bonne foi de la direction du Salon de Bâle: «Nous non plus, nous ne comprenons pas. C’est un désastre.»

swissinfo, Ariane Gigon Bormann à Zurich

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