Le reflet des peurs européennes
Comme en Suisse, les pays européens sont confrontés aux craintes sécuritaires de leurs citoyens.
Les Quinze élaborent une politique d’intégration plus ouverte pour les immigrés légaux. Mais ils veulent lutter contre l’immigration illégale.
«L’Union européenne n’applique pas du tout une politique restrictive en matière de droit d’asile», s’exclame Leonello Gabrici.
Pour le porte-parole d’Antonio Vitorino, commissaire responsable de la Justice et des Affaires intérieures, il faut distinguer l’immigration légale et l’immigration illégale.
C’est ainsi, selon Leonello Gabrici, que l’Union européenne s’apprête à mettre sur pied une politique «plus humaniste et plus ouverte» pour les demandeurs d’asile légaux.
En contrepartie, poursuit le porte-parole, il faudra effectuer un contrôle plus sévère aux frontières. La lutte contre l’immigration clandestine sera plus stricte.
En effet, il n’existe toujours pas de politique européenne en matière d’immigration et d’asile. Jusqu’en 1999, ces domaines relevaient de la compétence exclusive des Etats. Mais le Traité d’Amsterdam a mis un terme à cette situation.
Et, au sommet de Tampere, en octobre 1999, les chefs d’Etat et de gouvernement des Quinze ont décidé d’élaborer une politique commune dans ces domaines qui devraient entrer en vigueur en 2004. Un premier «paquet» de mesures devrait être adopté à la fin de l’année.
Comment éviter l’«asylum shopping»
«Aucun pays européen ne durcit actuellement sa législation en matière d’immigration légale», affirme Leonello Gabrici. Au contraire. Et de citer l’exemple de l’Italie qui vient d’accorder un permis de travail à 700 000 ouvriers illégaux.
Les Quinze ont ainsi défini une plate-forme commune. Et ils se sont mis d’accord pour harmoniser les procédures et les critères d’admission.
Il s’agit d’éviter l’ «asylum shopping», autrement dit que les demandeurs d’asile n’aillent frapper à la porte du pays ayant les conditions d’accueil les plus favorables.
Le Danemark et la Grande-Bretagne viennent de modifier – dans un sens plus restrictif – leurs lois en matière d’asile. Et ils ne sont pas les seuls.
Face aux préoccupations sécuritaires de leurs citoyens, tous les pays européens réagissent de la même manière, à savoir en restreignant l’immigration et le droit d’asile. La Suisse n’est donc pas un cas isolé.
Mais pour la Commission européenne, ces pays ne font qu’ajuster par avance leur législation à la politique européenne qui va être mise en place. Et il ne s’agit que d’un volet, celui de la lutte contre l’immigration illégale.
L’inquiétude des organisations humanitaires
Cette évolution inquiète cependant les organisations humanitaires. Elles estiment ainsi que l’on assiste, dans toute l’Europe, à un rétrécissement du droit d’asile. Et que la Convention de 1951 sur les réfugiés est progressivement vidée de son sens.
L’Europe n’est pas en train d’être envahie par des réfugiés. Pour s’en convaincre, il n’y a qu’à regarder les statistiques annuelles publiées par le Haut-Commissariat aux réfugiés des Nations Unies (HCR).
Entre 1992 et 2001, le nombre de requérants d’asile a presque diminué de moitié. Le flux d’arrivées se maintient entre 350 000 et 400 000 par an.
Certes, il peut y avoir des problèmes d’intégration dans certains pays, souligne-t-on au HCR. Mais, durcir les conditions d’accueil peut entraîner des conséquences dangereuses pour les futurs réfugiés.
swissinfo/Barbara Speziali à Bruxelles
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