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Les ONG suisses mettent la pression sur Tunis

La journaliste tunisienne Sihem Bensedrine. servizi.radicalparty.org, Lorenzo Ceva

Le gouvernement tunisien doit offrir des garanties en matière de respect des libertés publiques. C'est ce qu'exigent les ONG suisses.

Sinon, elles boycotteront – comme les ONG internationales – la 2ème phase du Sommet mondial de l’information prévue à Tunis.

«Nous voulons contribuer à ce que le prochain sommet de l’information (novembre 2005) ne soit pas une farce», lance Wolf Ludwig.

Accompagné de plusieurs représentants d’ONG internationales, tunisiennes et helvétiques, le syndicaliste suisse a donc posé, mardi à Genève, une série de conditions pour que la société civile internationale participe à la 2ème phase du Sommet mondial de l’information (SMSI) prévue à Tunis, en novembre prochain.

«Le gouvernement tunisien doit respecter les droits de l’homme et la liberté d’expression. Il ne doit pas entraver le travail et les mouvements de la société civile indépendante. Les journalistes et les internautes tunisiens emprisonnés doivent être libérés», détaille Wolf Ludwig.

Ces exigences sont également celles de communica-ch, la coalition des ONG suisses pour la société de l’information, une plate-forme d’associations et de syndicats constituée à l’occasion de la 1ère phase du SMSI organisée par la Suisse en décembre 2003 à Genève.

Or, jusqu’à maintenant, le régime du président Zine El Abidine Ben Ali continue à brider la liberté d’opinion et à harceler les journalistes indépendants et les défenseurs des droits de l’homme en Tunisie.

C’est du moins le constat établi par des organisations comme Amnesty international, la Fédération internationale des journalistes ou Reporters sans frontières (RSF).

Une police de l’information

Présente à Genève, la journaliste tunisienne Sihem Bensedrine, elle, parle même de régression dans ce domaine. «Il existe une police de l’information au sein du ministère tunisien de la communication. Cet organisme n’a pas d’existence formelle. Mais il agit très concrètement sur le terrain», assure la directrice de Kalima, un magazine en ligne périodiquement censuré en Tunisie.

Résultat, selon Sihem Bensedrine, quelque 500 prisonniers d’opinion continuent de croupir dans les geôles tunisiennes et nombre de défenseurs des droits de l’homme subissent de multiples entraves à leurs actions.

Or, cette ligne répressive menace la bonne tenue de la 2ème phase du Sommet mondial de la société de l’information organisée par la Tunisie. «Le président Ben Ali veut gérer ce sommet comme un commissariat», avertit Sihem Bensedrine.

Menace de boycott

Raison pour laquelle la société civile internationale – l’un des trois piliers avec les gouvernements et les entreprises du sommet onusien lancé à Genève en décembre 2003 – conditionne sa participation au sommet de Tunis.

Comme le précise la franco-tunisienne Meryem Marzouki, responsable du groupe de travail des ONG sur les droits de l’homme au sein du SMSI, la société civile accréditée à l’ONU évaluera en septembre les progrès réalisés par le gouvernement tunisien en matière de respect des libertés publiques.

Et si le régime du président Ben Ali ne répond pas aux conditions posées par les ONG suisses et internationales, les représentants de la société civile internationale menacent de ne pas participer au sommet de Tunis.

Wolf Ludwig précise que communica-ch va établir un partenariat avec des ONG tunisiennes réellement indépendantes comme le Conseil national pour les libertés en Tunisie pour les aider dans leur combat et dénoncer – s’il y a lieu – tout acte de répression à leur encontre.

«Nous comptons sur le gouvernement suisse pour soutenir notre action et nos exigences», souligne Wolf Ludwig.

Le soutien de la Suisse

Sur le principe, ce soutien helvétique semble déjà acquis. Organisatrice de la 1ère phase du SMSI, la Suisse officielle a répété à plusieurs reprises que la liberté d’expression et le respect des droits de l’homme étaient au cœur du SMSI et de la société de l’information qu’il est censé encadrer.

«C’est l’ONU qui a décidé de confier la 2ème phase du SMSI à la Tunisie. Un mandat qui comporte un certain nombre d’exigences en matière de respect des libertés et des droits de l’homme», déclare à swissinfo Marc Furrer, président de la Commission fédérale de la communication.

Et le chef de la délégation suisse au SMSI d’ajouter: «En novembre, le monde entier aura les yeux braqués sur la Tunisie.»

Un point de vue que partage Guillaume Chenevière. Membre de communica-ch , l’ancien patron de la Télévision suisse romande (TSR) souligne également la valeur exemplaire de ce sommet tunisien.

Un sommet emblématique

«La Tunisie n’est pas – et de loin – le seul pays qui ne respecte pas la liberté d’expression. Il est donc extrêmement important d’obtenir de son gouvernement une amélioration effective du respect des libertés publiques», souligne Guillaume Chenevière.

«Si tel n’est pas le cas, les autres régimes autoritaires en tireront la conclusion que la communauté internationale se désintéresse de la question des droits de l’homme.»

«Or, conclut Guillaume Chenevière, les technologies de l’information et de la communication sont en train de devenir des instruments de surveillance et de répression. Et le monde industriel se livre une compétition féroce pour offrir des systèmes de contrôle toujours plus performants.»

swissinfo, Frédéric Burnand à Genève

L’objectif du Sommet mondial de la société de l’information est de combler le fossé numérique entre riches et pauvres et de promouvoir une société de l’information ouverte.
La première phase du SMSI a été organisée par la Suisse en décembre 2003, à Genève.
La Tunisie est l’organisatrice de la 2ème phase du sommet prévue en novembre à Tunis.
Une conférence préparatoire du SMSI se tient cette semaine à Genève.

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