Michel Tabachnik retourne devant les juges

Le procès en appel du chef d'orchestre franco-suisse s'est ouvert mardi matin à Grenoble. Le musicien est accusé d'avoir poussé au suicide certains adeptes de l'Ordre du temple solaire (OTS).

En 2001, le musicien et auteur d’écrits ésotériques avait été relaxé au bénéfice du doute. Entre 1994 et 1997, 74 membres de la secte s’étaient donnés la mort en Suisse, en France et au Canada.

Poursuivi pour ‘association de malfaiteurs’ après la mort de 16 adeptes de l’Ordre du temple solaire (OTS) en 1995 en France, Michel Tabachnik s’est refusé à toute déclaration à son arrivée au palais de justice de Grenoble.

Auteur d’écrits ésotériques, il est accusé d’avoir poussé les adeptes à un ‘transit vers Sirius’, c’est-à-dire à se suicider avec leurs proches.

Le procès en appel doit durer deux semaines. Michel Tabachnik avait été relaxé au bénéfice du doute en avril 2001. Le parquet, qui avait requis cinq ans de prison à son encontre, avait fait appel.

Cinq ans de prison

Il y a cinq ans, le procès avait mis en évidence les écrits de Michel Tabachnik, des textes incompréhensibles pour le commun des mortels, mêlant des notions tirées de l’alchimie, de la Kabbale, de l’astrophysique, ou évoquant «l’imminence de grands cataclysmes et de profondes mutations accompagnant le passage de l’humanité du 4e au 5e règne identifié à la notion de retour vers le père».

Le parquet avait néanmoins eu du mal à démontrer que les textes doctrinaux du chef d’orchestre nommés les ‘archées’, devaient placer les futures victimes «dans une dynamique mortifère».

Dans son jugement, le tribunal avait indiqué que, pendant «la réalisation des actes préparatoires concrétisant le projet criminel, Michel Tabachnik (était) resté éloigné des activités de la secte».

Il n’était réapparu que «pour annoncer aux membres de l’OTS, lors de réunions tenues à Avignon les 9 juillet et 24 septembre 1994, la fin du Temple et de l’ordre templier, et proposer la constitution d’une nouvelle organisation, l’alliance Croix».

De nombreux reports

Le procès en appel de Michel Tabachnik a subi de nombreux reports en raison de la mise en examen (inculpation) à Paris de Jean-Marie Abgrall, le principal expert psychiatre du dossier de l’OTS, pour ‘violation du secret de l’instruction et du secret professionnel’.

Partie civile dans le procès de l’OTS, Alain Vuarnet, qui a perdu sa mère et son frère dans le Vercors, est persuadé qu’il s’agissait en fait d’un assassinat pratiqué par un commando.

Il a fait exhumer les corps de ses proches et eu recours à un expert qui a affirmé qu’ils avaient été tués à l’aide d’un lance-flammes au phosphore. Mais une expertise officielle avait démenti sa théorie.

Le souvenir de Cheiry et Salvan

Pour mémoire, le 22 décembre 1995, dans une forêt du massif du Vercors, les corps calcinés de seize personnes, dont trois enfants, avaient été découverts. Les victimes avaient été tuées par balles et quatre armes avaient été retrouvées sur place.

Au total, 74 personnes ont perdu la vie dans des ‘tueries suicides’ de l’OTS entre septembre 1994 et mars 1997. Les suicides de Cheiry et Salvan, en Suisse, ont notamment conduit à la mort de 48 personnes, dont le gourou de la secte, Jo Di Mambro, et le ‘rabatteur’ Luc Jouret.

La chronologie de l’OTS

1983 – Fondation à Genève d’un ordre réunissant plusieurs groupes ésotériques, notamment par le Belge Luc Jouret et le Français Joseph Di Mambro. En 1990, la secte prend le nom d’Ordre du Temple solaire (OTS).

30 septembre 1994 – Un Suisse de 35 ans, son épouse britannique et leur bébé de trois mois sont assassinés à Morin Heights (Québec) dans une maison appartenant à Di Mambro. Quatre jours plus tard, un couple suisse est aussi retrouvé mort dans la même localité. L’homme était l’un des meurtriers du 30 septembre.

5 octobre 1994 – 23 cadavres sont découverts dans une ferme incendiée à Cheiry dans le canton de Fribourg. Le même jour, 25 cadavres, dont ceux de Jouret et Di Mambro, sont retrouvés à Salvan en Valais.

23 décembre 1995 – 16 cadavres disposés en étoile sont découverts dans le massif du Vercors en France.

3 avril 1996 – Les trois juges ayant mené l’enquête en Suisse présentent leurs conclusions. Pour eux, aucun des responsables des massacres n’a survécu.

22 mars 1997 – Cinq cadavres sont retrouvés dans la maison d’un membre de l’OTS à St-Casimir au Québec. Le bilan total se monte à 74 victimes (30 Suisses, 30 Français et 10 Canadiens).

18 août 1998 – Le Tribunal cantonal fribourgeois prononce un non- lieu sur le drame de Cheiry. En Valais, le drame de Salvan n’a pas eu de suites judiciaires.