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Micheline Calmy-Rey et les espions turcs

Après les sourires, peut-être des tensions entre Ruth Metzler (à g.) et Micheline Calmy-Rey. Keystone Archive

Le voyage que la ministre suisse des Affaires étrangères aurait dû effectuer en Turquie au début du mois aurait été annulé pour ses liens jugés trop étroits par Ankara avec les Kurdes.

C’est un espion turc qui aurait mis le feu aux poudres entraînant des réactions en chaîne au sein du gouvernement fédéral.

En août dernier, la cheffe de la diplomatie suisse se trouve à Lausanne à l’occasion des assises de la Direction pour le développement et la coopération (DDC).

Un homme d’origine kurde aborde Micheline Calmy-Rey – qui doit se rendre quelques jours plus tard en visite en Turquie – afin de la rendre attentive à la situation des Kurdes.

La discussion est brève et Mme Calmy-Rey suggère à son interlocuteur de lui écrire. Témoin de la scène: un espion turc qui avertit Ankara.

Et le 1er septembre, la Turquie annonce que la conseillère fédérale n’est plus la bienvenue.

Le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) informe alors que les Turcs se disent offensés par la reconnaissance du génocide arménien de 1915 par le Parlement du canton de Vaud.

Branle-bas de combat

Selon la presse dominicale, c’est une note des services secrets turcs adressée au Service d’analyse et de prévention (SAP) de l’Office fédéral de la police qui met le feu aux poudres.

Cette note explique que c’est l’intérêt porté par Micheline Calmy-Rey au problème kurde qui est la véritable raison de l’annulation de sa visite – report, dit Ankara.

Le chef du SAP, Urs von Däniken, remet cette fameuse note à sa supérieure, qui n’est autre que Ruth Metzler, ministre de la Justice et de la Police.

Court-circuitage?

Celle-ci, toujours selon la presse dominicale, transmet le document au président de la Confédération Pascal Couchepin qui voit rouge.

Pascal Couchepin convoque alors Micheline Calmy-Rey sans l’informer du contenu de la réunion, qui a eu lieu le 3 octobre. Et sa collègue Metzler ne la prévient pas non plus.

Ce sont les services de la cheffe de la diplomatie qui découvrent la raison de la convocation.

Mme Calmy-Rey a affirmé samedi que c’était de l’histoire ancienne. Tandis que Ruth Metzler s’est étonnée que l’on parle de cette affaire maintenant.

La formation du nouveau gouvernement fédéral, le 10 décembre, n’y est sans doute pas étrangère. Un des sièges du Parti démocrate-chrétien, dont est membre la ministre de la Justice, étant plus que menacé après les élections fédérales du 19 octobre dernier.

Le Parlement va se pencher sur l’affaire

La Délégation des commissions de gestion décidera ces prochains jours s’il y a lieu d’examiner en détail les circonstances de l’affaire.

Son président, Alexander Tschäppät, a indiqué dimanche à l’ats qu’il s’agira notamment d’analyser le rôle respectif des différents services de renseignements de la Confédération afin de savoir si la voie usuelle a bien été respectée.

Quant à la Commission de politique extérieure du Conseil des Etats (Chambre des cantons), elle se pencherala semaine prochaine sur les relations entre la Suisse et la Turquie.

Et cela après l’annulation de la visite de Mme Calmy-Rey prévue début octobre, a précisé le président de la commission Maximilian Reimann.

Enquête du Ministère public de la Confédération

Le Ministère public de la Confédération (MPC) entend lui aussi éclaircir cette affaire d’espion turc, révélée samedi par le Tages-Anzeiger.

La lecture de l’article du quotidien zurichois a quelque chose de «stupéfiant», a déclaré le porte-parole du MPC, Hansjürg Wiemer. «Nous allons chercher des éclaircissements et les confronter aux faits présentés par le journal», a-t-il ajouté. «Naturellement, nous voulons connaître le fond de cette affaire».

Au cas où les premières investigations conduiraient le MPC à des indices d’espionnage des services secrets turcs à l’encontre de Micheline Calmy-Rey, les autorités seraient alors mises en demeure d’ouvrir une enquête pénale pour activités interdites de services de renseignements étrangers sur sol suisse.

Le Département de Ruth Metzler ainsi que celui de la principale intéressée, le DFAE, n’ont pas voulu commenter cette affaire. Le porte-parole du Conseil fédéral, Achille Casanova, n’a pas non plus réagi.

swissinfo et les agences

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